dimanche 10 février 2013

LA TRAÇABILITE, UNE AMIE QUI NOUS VEUT DU MAL.


À l'heure où l'on nous met dans des plats surgelés du cheval à la place du boeuf, nous pouvons nous dire : heureusement qu'il y a Findus, puisqu'il nous permet de nous reposer la question de cette traçabilité. Dans le dernier périodique de la Fédération des Travailleurs de la terre et de l'Environnement de la CNT, la question est posée. En voici la teneur. Bon appétit !

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Traçabilité, voilà un mot qui ,en quelques décennies, est entré dans le vocabulaire commun, avec une connotation tout à fait positive. Cette vulgarisation est un signe, parmi tant d'autres, de l'industrialisation de tous les secteurs de la société et cette acceptation celui de la domestication des esprits.
Alors d'où sort ce concept de traçabilité (anglicisme de traceability) à quoi et à qui sert-il et quels effets induit-il sur la production et la distribution non industrielles ?
C'est au début du XXème siècle qu'il est apparu dans l'industrie ,pour répondre aux problèmes posés par la production industrielle de masse du modèle fordiste.

Dans l'Union européenne, c'est la crise sanitaire dite de « la vache folle », mais aussi l'arrivée des OGM agricoles, qui a permis son application et son acceptation.
Les règlements européens imposent désormais aux entreprises du secteur agroalimentaire une obligation générale de traçabilité des denrées alimentaires à tous les stades de la chaîne de production et de commercialisation.

L'application de ce concept industriel a été pour les productions et les échanges non industriels un changement de logique radical, éliminant nombre de petits producteurs et de modes ancestraux de consommation.
Dans la pratique, le producteur doit donc désormais, du premier stade de la production, au dernier stade de la consommation, quelque soient les volumes produits et leur mode de distribution, au quotidien, identifier, étiqueter, enregistrer, évaluer tous ses faits et gestes et rendre compte à l'administration de tout cela.
Il s'est vu imposé ainsi, par les réglementations successives, l'emploi de techniques hitech – puce électronique par exemple pour l'identification de ses animaux- ou de méthodes de fabrication conçues pour l'industrie.

Ce changement de logique de la production et de la distribution fait non seulement le vide chez les producteurs fermiers mais détruit aussi peu à peu les savoirs faire qui, depuis toujours, permettaient de produire en toute sécurité une alimentation saine et goûteuse et une distribution au plus près du consommateur.
Ce qu'il faut bien comprendre ,c'est que si pour la production « fermière » ces normes sont inadaptées, excessives, handicapantes et destructrices, pour la production industrielle elles sont indispensables car, dans ce cadre là, les risques son accrus. La perte de la diversité biologique, les méthodes d'élevage ou de culture, la baisse de la qualité biologique des produits de base, les quantités mises en circulation, augmentent considérablement les risques.
Avec la production industrielle le risque est permanent et la confiance du consommateur, clé de voûte de la consommation de masse, peut-être à tout moment dégradée. Toute hécatombe l'entame. Du moins les hécatombes trop voyantes ou trop concentrées dans le temps, puisque par exemple, les conséquences de l'absorption de doses quotidiennes de pesticides ne sont pas prises en compte dans cette évaluation des risques encourus.
La traçabilité, concept industriel par excellence est donc devenue, par la force des choses, le passage obligé pour toute production et toute distribution alimentaires industrialisées ou non, induisant, de fait, une industrialisation des producteurs fermiers et des distributeurs artisanaux ou associatifs.
La conséquence de cette industrialisation est pour le producteur d'être de plus en plus dépossédé de ses actes de production, et pour le consommateur d'être obligé de confier le choix qualitatif de son alimentation aux distributeurs industriels et à l'administration.
Un certain nombre de producteurs et de consommateurs refuse cette logique car elle condamne les modes de vie non industriels, basés, eux ,sur des valeurs humaines, d'éthique, de confiance, de responsabilité, de liberté.
Non seulement ils disent non, mais ils s'organisent pour produire et échanger en dehors de ce carcan industriel et administratif. Favorisant le contrat et la transparence, la responsabilité individuelle et collective, ils mettent en place des outils de proximité.

Malheureusement, pour l'instant du moins, cela ne représente qu'une frange minime de la production et de la distribution. La remise en cause de cette industrialisation ne se fait que trop marginalement à l'occasion d'une fermeture d'un petit abattoir, de l'ouverture d'un centre commercial ou de l'entrée en vigueur d'une nouvelle mesure administrative. Et si une résistance rampante existe bel et bien, une contestation ouverte de toutes les mesures entraînant cette industrialisation reste à mettre sur pied.
La prise de conscience de tout cela est le premier pas nécessaire pour éventuellement espérer changer quelque chose à nos vies.
C'est ce que défend la Fédération des Travailleurs de la Terre de la CNT; C'est ce que pratiquent les producteurs qui la composent; C'est ce que la coopérative cénétiste Coopéquita de Bordeaux propose.
Toute servitude doit être volontaire pour durer.

Bernard Gilet CNT-FTTE

Sur le sujet voir PUCAGE, IDENTIFICATION, TRACABILITE ET CONTROLE SOCIAL
dans le dernier Vent Se Lève (n°12) sur cnt-f.org/ftte/ ou sur le site http://contrelepucage.free.fr 

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