Une fois n’est pas coutume, cet édito ne parlera pas de problèmes de
société ni même de politique à proprement parler. Pour une fois, nous
allons parler de nous, les anarchistes, de nos accès de mélancolie et de
notre «drapeau noir en berne sur l’espoir». Combien de fois dans une vie
militante se dit-on: «À quoi bon?» Combien de fois nous sentons-nous
découragés face à l’ampleur de la tâche devant nous, devant ceux qui nous
combattent comme devant ceux qui s’en foutent? Dans ces moments-là, il est
tentant de baisser les bras et de se décharger sur les copains. Se
réfugier derrière «d’autres le feront» revient à souscrire à la vieille
croyance capitaliste du «nous sommes tous remplaçables».
Eh bien, non. Les débats que nous n’organiserons ne seront pas organisés.
Les tracts que nous ne distribuerons pas ne seront pas distribués. Les
livres que nous n’écrirons pas ne seront ni écrits, ni publiés, ni lus.
Assez de jérémiades sur ce pauvre monde qui crève, si éloigné de notre
idéal libertaire, et sur nous-mêmes, nos défauts, nos faiblesses. Prenons
quelques instants pour faire le constat de notre impuissance actuelle
vis-à-vis de certains événements: Syrie, mouvements sociaux tièdes…
Ce constat douloureux nous est nécessaire. Associé à un retour sur les
apprentissages de l’action passé, il sera moteur de l’action future. Si
«la plus petite fortune, le plus mince établissement, la mise en place de
la plus chétive industrie, exige un concours de travaux et de talents si
divers, que le même homme n’y suffirait pas» (Pierre-Joseph Proudhon),
notre intelligence collective se doit de s’ouvrir sur des apports nouveaux
et extérieurs, tant du point de vue de la théorie que de la pratique, pour
ne pas se scléroser davantage.
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