dimanche 27 janvier 2013

Et si on se passait de la monnaie ?



L'INJUSTICE ÉCONOMIQUE est une injustice majeure. Trop de personnes, en France et ailleurs, ne peuvent manger convenablement, se loger décemment, être soignés correctement, vivre dignement à cause de revenus trop faibles. Il n'est pas possible de tolérer cela et de porter le moindre crédit au mythe selon lequel la pauvreté est un phénomène naturel. L'organisation même de l'économie française et mondiale sem- blent imposer de ne pas remédier à cette injustice : les riches sont au pouvoir et il faut qu'il y ait une certaine masse de pauvres pour qu'ils restent riches. L’excuse de la compétitivité permet le maintien des profits patronaux, sur le dos des travailleurs-euses.
Face à cette injustice, on peut proposer l'égalisation des revenus, en augmentant la redistribution en taxant davantage les riches, ou en imposant des salaires plus égalitaires. Cette solution, simple et immé- diate, est séduisante. Mais résoudra-t-elle la question du chômage, alors qu’il s’agit d’un des principaux phénomènes qui tirent les salaires vers le bas ? Nous mettra-t-elle automatiquement à l’abri de l’inflation, des crises monétaires et de l’explosion des dettes publiques ? On peut en douter, malheureusement.
Dans notre système économique, nombre des déséquilibres et des injustices sociales sont liées aux flux d’argent et à l’inégale répartition de la monnaie. La monnaie est certes un moyen d’échange efficace, plus souple que le troc. Elle per- met, si l’on en a suffisamment, de se pro- curer tout ce que l’on souhaite. Mais aujourd’hui, la monnaie crée aussi de la rareté là où il n’y en a pas : dans une société d’abondance comme la nôtre, où les produits alimentaires sont en quantité suffisante pour que tout le monde puisse se nourrir à sa faim, elle empêche les plus pauvres d’accéder aux produits de base. Dans la perspective d'une société plus juste, sans État, une idée plus radicale encore que l'égalisation des revenus apparaît alors. Si tout le monde doit recevoir autant, à quoi bon conserver la monnaie ?
L’idée peut sembler audacieuse, provocante, irréaliste voire farfelue. Pourtant, imaginons un monde sans monnaie : tous les biens et services accessibles à tous, sans avoir à payer. Il suffit de se servir au (super)marché ou dans tout autre com- merce de ce dont on a besoin, et envie. Pourquoi se priver s’il y a assez pour tous ? La règle fondamentale de ce système économique serait « de chacun selon ses capacités, à chacun selon ses besoins » : tous participent à la production en fonction de leurs possibilités, et tous peuvent en jouir librement pour satisfaire leurs besoins.
Qui n’a jamais rêvé un monde sans course au profit ? Pourquoi être exploité pour produire des gadgets inutiles et pol- luants s’il n’est pas nécessaire de produire absolument de la « richesse », de générer un revenu ? De combien de tâches liée à l’existence de monnaie pourrait-on faire l’économie ! Qu’on pense seulement à toutes les personnes travaillant dans la banque, la finance ou la comptabilité, tous les caissiers et les contrôleurs, autant de monde qui pourrait être utilement employé à d’autres métiers, réduisant d’autant la charge de travail qui leur est liée. Abolir la monnaie permettrait à tous de travailler, et de travailler moins long- temps, tout en vivant dans l’abondance... Plus besoin de favoriser les activités rentables, c’est la décision collective et l’utilité publique qui pourraient enfin guider les choix en matière de constructions et d’aménagements, de productions et d’échanges. Finis aussi le problème des retraites et le déficit de la sécurité sociale. Plus fondamentalement encore, se passer de la monnaie, c’est se donner la possibilité de repenser plus concrètement la gestion de la société, de façon plus locale et démocratique. Plus besoin d’une structure englobante qui prélève les impôts et redistribue l’argent, paye les fonctionnaires et élève des bâtiments publics. Tout peut être géré localement, au sein de petites communautés fédérées. On limite ainsi au maximum la nécessité de désigner des représentants, et le pouvoir qui leur est accordé. L’État peut aisément laisser place à l’autogestion.
Bien sûr, une société sans monnaie ne peut être une société parfaite. Tout un ensemble de questions se posent aux- quelles il faudra trouver des réponses satisfaisantes. Comment gère-t-on la rareté et la pénurie si le prix n’est plus un obstacle ? Comment détermine-t-on quoi produire et en quelle quantité ? Comment garantit-on que les besoins de logement de chacun seront satisfaits ? La société anarchiste et autogestionnaire est à construire, et ne se fera pas sans vous.
C'est bien le sens de la création de la Fédération anarchiste sur Villeurbanne. 

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